Vlissingen



Vlissingen, le 3 novembre 2007
Je suis aux Pays-Bas, sur la plage, non loin de Vlissingen.
Quelques promeneurs égarés longent la plage. En couple souvent. Accompagnés d'enfants, parfois. De rares propriétaires de chiens sont là aussi, qui passent devant moi tenant à la main de drôles de bâtons colorés. Dernier gadget à la mode sans doute. Sorte de saguet permettant de lancer, apparemment sans effort, la balle que l'animal, servile mais joueur, rapportera en se trémoussant de bonheur.
Pourtant qu'elle est belle cette lumière. Magnifiante. Harmonisant avec soin les couleurs.
En rideau de fond de scène la dune, plantée de vert, découpe avec grâce le ciel engorgé de nuages blancs et jouflus tandis que sur la plage glissent les bateaux. Géants d'acier barbotant dans le petit bassin. A quelques centaines de mètres du bord à peine, passent en silence d'énormes porte-contenaires et autres supertankers bariolés. Entre les deux une langue de sable humide affiche ses nuances entre gris et bruns dorés. Quelques flaques d'eau salée, déposées par la marée, émaillent la scène. Miroirs tendus au nuages. Déposés eux aussi, des déchets multiples et variés mais tous de plastique ou de caoutchouc. Je croise, au milieu des dizaines de sacs plastiques enmêlés aux algues échouées, un gant mappa rose, des boîtes de soda, des pots de yahourt, des emballages de barres chocolatées, d'innocents morceaux de plastique informes et le sentiment que nous avons tout gâché. Abîmé les paysages les plus subtiles. Tant pis pour nous. Je profite de ce qui me reste avec gourmandise en remontant le long de la plage pour traverser la dune et rentrer à la maison.
Je m'arrête au sommet pour profiter encore.
Un groupe de quatre jeune gens me rejoint en riant et braillant. Ils sont à peine plus jeunes que moi. Me regardent sans me voir. Avec sa bonne tête de vainqueur local et ses cheveux oxygénés, l'un des deux mâles exibe son téléphone portable et tente une prise de vue. Les trois autres se regroupent en glapissant. Celle qui doit être sa moitié glapit plus fort encore. Au moment où il appuie sur le bouton, la machine imite sans conviction le bruit de l'appareil photo avant d'agglutiner sur un écran minuscule quelques milliers de pixels censés composer une image. Les trois se précipitent pour admirer le résultat. Reproduction fidèle de ce moment inoubliable.
Pas un regard sur les vagues qui s'agitent pour attirer leur attention, sur la dune qui danse, la plage qui attrappe le soleil et prend la pose.
Ils partent en jetant deux mégots dans les hautes herbes bordant le sentier.
J'ai eu raison d'en profiter.
Ghyslain Bertholon
PS : désolé pour le lyrisme, l'air iodé... sans doute...